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Qui était et d’où venait Pierre MIVILLE dit «Le Suisse» ?
Malheureusement, il n’a pas été possible d’obtenir de même lorsque les homonymies disparaissent d'el-
des données équivalentes pour la Suisse, mais néan- les-mêmes avec l'évolution démographique (3).
moins, le patronyme semble y être également très
rare, et à l'évidence pour les mêmes raisons. Or comme toute la littérature helvétique et québécoi-
se sur Pierre MIVILLE est basée sur une même sour-
Localement, et même sans aucun document filiatif, il ce très ancienne de 1923 (8), elle doit être entièrement
y a également filiation automatique entre un patrony- réanalysée à la lumière de ces nouvelles connaissan-
me et un ancien surnom identique, ou presque. Au ces.
départ par exemple, le "de" des surnoms de lieux a
perduré, mais sans que cela corresponde en rien à une
particule nobiliaire, si ce n'est d'être aussi une prépo- Le cas Pierre MIVILLE
sition. Puis quand le sens s'est émoussé, la préposi-
tion a disparu, soit par omission soit par intégration. Son parcours
Ainsi, le surnom "des champs" est devenu un patro-
nyme DES CHAMPS puis DESCHAMPS, et "de v Parcours civil
miville" est d'abord devenu DE MIVILLE, puis Il est bien établi que ce Pierre MIVILLE a vécu plu-
DEMIVILLE ou MIVILLE. sieurs années à Brouage (Charente) avant de s’embar-
quer à La Rochelle pour la Nouvelle-France, et qu’il a
Par contre, la fatuité est éternelle, et jusqu'au début du débarqué à Québec vers août 1649. Il existe ensuite
20 siècle, on pouvait ainsi s'acheter une particule une abondante documentation sur sa vie après cette
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avec la complicité de généalogistes professionnels date (1,2,14,15). Au Canada, Le Suisse n’est d'ailleurs
peu regardants. Or à la Renaissance, de riches bour- pas à proprement parler un surnom, mais plus un qua-
geois en ont également profité pour s'affubler d'une lificatif souvent accolé à son nom.
particule après avoir racheté des seigneuries à des
nobles ruinés, et même sans aucune référence à un Par contre, la période antérieure à son séjour à
nom de lieu ! Par exemple à St-Claude (Jura), Brouage est certes abondamment documentée, mais
MILLET est un nom banal dérivé d'un métier (13). Or très mal, car elle repose exclusivement sur des sources
de 1630 à 1690, une riche famille de ce nom avait dû secondes de fiabilité éminemment douteuse. Pierre
racheter une seigneurie voisine à Epercy, et pour l'af- serait ainsi né à Fribourg vers 1602 mais aucun docu-
fichage de leur réussite, ils se faisaient appeler DE ment officiel ne l'atteste.
MILLET, et le père se disait même écuyer.
Puis vers 1629, Pierre MIVILLE épouse une
Charlotte MAUGIS, originaire de Saint-Germain-de-
v Transmission dans l'espace Jonzac (aujourd’hui Saint-Germain-de-Lusignan,
Une règle absolue est aussi qu'en cas de migration, écart de Jonzac), mais son acte de mariage reste là
aucun surnom n'est jamais conservé. aussi introuvable. Il s’installe alors à Brouage avant
1632, c'est à dire dans la cité natale de Samuel de
Avant les patronymes en effet, la signification sur le Champlain, le fondateur de la ville de Québec en
lieu de départ n'aurait eu aucun sens sur le lieu d'arri- 1608.
vée, et la migration ne peut alors se traduire que par
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un changement de surnom, comme par exemple une Aux 14 et 15 siècles, Brouage était un port de com-
nouvelle référence au lieu de départ. D'où par la suite merce très sûr, et il pouvait ainsi abriter jusqu'à 200
tous les patronymes dérivés d'un nom de province, bateaux. C'était aussi le premier port exportateur de
comme LYONNET, LORRAIN ou BOURGUI- sel en Europe, et notamment pour les pêcheurs de
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GNON (13). morue de Terre Neuve. Au 16 siècle, l'importance
stratégique de Brouage en avait fait une "ville royale",
De même après les patronymes, les homonymies mais son port avait quand même été en partie saboté.
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gênantes du lieu de départ ont complètement disparu Au 17 siècle, c'était toujours un port de mer (Fig. 1),
sur le lieu d'arrivée, et faute d'utilité, les anciens sur- mais c'était surtout une place forte catholique voulue
noms sont désormais omis (6). Et il en est d'ailleurs par Richelieu. Sa fonction était ainsi de protéger l'Ile
d'Oléron, et aussi de faire pièce à la place protestante
37GÉNÉALOGIE Franc-Comtoise n°161